Une seconde étude, confirme l’intérêt d’une utilisation combinée de l’ibrutinib (i) avec les CAR-T

Publié le : 29 octobre 2019Tags:

Comparaison de l’efficacité et de la toxicité des CAR-T en association ou non avec de l’ibrutinib chez les patients avec une leucémie lymphoïde chronique (LLC) en rechute ou réfractaire.
Comparison of Efficacy and Toxicity of CD19-Specific Chimeric Antigen Receptor T-Cells Alone or in Combination with Ibrutinib for Relapsed and/or Refractory CLL

D’après une communication de Jordan Gauthier et al., abstract #299, ASH 2018.

Contexte de l’étude

Des réponses durables sont obtenues avec les cellules T modifiées par la présence d’un antigène chimérique CD19 (JCAR014) chez les patients avec une LLC en R/R et par ailleurs en échec d’un traitement par i (Turtle, JCO 2017; NCT01865617). Dans ces études, i n’a pas été introduit pendant le traitement par CAR-T. Une association avec i pourrait diminuer la progression tumorale après son arrêt, mobiliser les cellules leucémiques dans le sang, améliorer la fonction des CAR-T et enfin diminuer le risque de syndrome de relargage des cytokines (CRS).

Objectifs de l’étude

Cette phase 1/2 étudie un traitement par immunothérapie avec des cellules T modifiées par la présence d’un antigène chimérique CD19 chez
des patients avec une LLC en R/R. La lymphodéplétion a associé un traitement avec cyclophosphamide et fludarabine (Cy/Flu) suivi par de l’administration de CAR-T JCAR014 à la dose de 2 x 106 CAR-T /kg (Turtle, JCO 2017). L’évolution de ces patients (cohorte sans-i) a été
comparée à une cohorte qui a reçu Cy/Flu et des CAR-T JCAR014 à la dose de 2 x 106/kg avec en association i (420 mg/d) au moins deux
semaines avant la cytaphérèse et jusqu’à 3 mois après l’administration des CAR-T JCAR014 (cohorte avec i). Une réduction des doses est permise pour raison de toxicité. Le grade du CRS a été codé en fonction des critères de Lee (Lee, Blood 2014) et la toxicité neurologique et les autres grades CTCAE v4.03.

Résultats de l’étude

Dix sept et dix neuf patients ont été traités respectivement dans la cohorte avec i ou sans i. Il n’existe pas de différence significative de caractéristiques des patients entre les deux cohortes (tableau 1). La progression de la maladie sous i a été notée chez 16 (94%) et 18 patients (95%) dans les deux cohortes respectivement. Avant i, une intolérance a été observée chez un patient dans les deux cohortes. Le suivi médian chezles patients répondeurs est de 98 et 764 jours dans la cohorte avec i et dans la cohorte sans i. Le traitement par i en association avec le traitement par Cy/Flu et JCAR014 a été bien toléré; i a été réduit ou interrompu chez 6 patients (35%) après une médiane de 21 jours après l’administration des JCAR014. Dans la cohorte avec i, 1 patient avec un CRS de grade 2 a développé une arythmie cardiaque mortelle et un
autre patient a développé un hématome sous dural dans le contexte d’un traumatisme et d’une thrombopénie. À noter l’absence de différence de cytopénies de grade ≥3 entre les deux bras. L’administration de i ne modifie pas la fréquence ou la sévérité de la neurotoxicité. La fréquence des patients avec un CRS grade ≥1 est identique dans les deux cohortes (76% vs 89%, p = 0.39) mais sa gravité (grade ≥3 : cohorte avec i, 0%; et cohorte sans i, 26% ; p = 0.05). Le pic sérique d’IL-8 (p = 0.04), d’IL-15 (p = 0.003) et de MCP-1 (p = 0.004) est moindre dans la cohorte avec i.
À noter aussi un taux de CD8+ (p =0.29) et de CD4+ (p = 0.06) plus élevé dans la cohorte avec i.16 patients (94%) et 18 patients (95%) dans la cohorte avec ou sans i sont évaluables pour la réponse. Il existe plus de patients répondeurs (RC et RP) dans la cohorte avec i comparée à la cohorte sans i (88% vs 56%, p = 0.06). Dix sur douze patient (83%) avec des adénopathies avant traitement par Cy/Flu and JCAR014 ont une réponse RC ou RP dans la cohorte avec i comparé à seulement 10/17 patients (59%) dans la cohorte sans i (p = 0.23). La fréquence des patients sans maladie médullaire par CMF après traitement par CAR-T est identique dans les deux bras (75% vs 65%, p = 0.71). Il existe cependant une fréquence plus élevée de MRD indétectable dans la cohorte avec i quand les études moléculaires de détection de la MRD sont utilisées à 4 semaines (83% vs 60%, p = 0.35). En conclusion, i administré deux semaines avant la cytaphérèse et jusqu’à 3 mois après l’administration des JCAR014 est bien toléré et cette approche thérapeutique pourrait permettre de diminuer la fréquence et la sévérité des CRS et d’augmenter la réponse chez les patients avec une LLC en R/R.

Tableau 1 : caractéristiques des patients.

Tableau 1 : caractéristiques des patients.

Quels impacts sur les connaissances et les pratiques cliniques ?

Il n’y a pas d’impact dans l’immédiat à cause l’absence d’accès aux CAR-T dans le plus grand nombre de centres de référence en France.

Critique méthodologique

Les auteurs comparent 2 stratégies différentes (avec ou sans ibrutinib) dans 2 cohortes de patients non randomisés. Il est donc difficile de tirer des conclusion définitives. La preuve de la diminution de l’incidence des CRS ne pourrait être apportée que par un essai randomisé.

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